Mon Dieu quelle journée d'hier encore, et si j'ai mis plus de 24h pour écrire ce résumé c'est aussi qu'il m'a fallu du temps pour digérer. A posteriori, avec le recul , il est facile de tirer un bilan positif, mais sur le vif.... La montagne est une école de la vie, où il faut prendre sur soi, se dépasser physiquement et mentalement, mais une école où dans ce milieu pas toujours favorable, les valeurs humaines ont un sens, les caractères se révèlent, les masques tombent.
Hier donc on est partis avec Lionel , Adrien et Elise sa fille faire le canyon de Sciala. Pierre Jean , le bon de la veille nous avait prévenu.... " il y a une marmite siphonante mortelle où un très bon espagnol est décédé, moi je n'y vais pas"...
Pourtant en se renseignant il se trouve que ce canyon vient d'être rééquipé et qu'une main courante permet d'éviter la dite marmite, source de tant de craintes de ma part. En plus un groupe y est passé 4 jours avant et a trouvé de bonnes conditions. Avec l'entrainement d'hier au Bitet et la préparation de Lionel accompagné d'Adrien qui est lui aussi un pro du canyon, les doutes s'estompent à mesure que le canyon se rapproche.
On arrive donc sur place vers 10h et on s'équipe avant d'attaquer l'approche très courte. En moins de 10mn on est dans le vif du sujet. Et le vif du sujet c'est une eau très froide , un débit qui secoue et un premier rappel qui nous permet d’atterrir au pied du torrent dans le quel il faut se jeter. Très beau passage ensuite avec une eau limpide ,quelques sauts , un rappel avant d'arriver ..... là!
Là, c'est exactement là où il y a les trois rappels. Là c'est à l'endroit où il faut éviter la marmite siphonante. Là , c'est là où il y a eu un mort. Là , c'est là où il faut assurer sous peine de se faire sanctionner, et la sanction, en canyon comme en montagne, peut faire très mal. Première main courante équipée par Adrien et c'est à mon tour de passer. On ne sait pas encore si dessous il y a la marmite mais avant d'attaquer le rappel il me dit clairement de bien regarder partout voir s'il n ' y a pas des points avec la main courante. Je descends de 3m, me pose dans une zone plus calme et observe à droite puis à gauche , mais surtout à droite ( car j'ai été induit en erreur par une photo) et ne voit pas de points. Je ne sais pas à ce moment là si effectivement les points n'étaient pas visibles car cachés derrière un éperon, où si c'est moi qui perturbé par la photo et le stress sans doute, n'ai pas regardé là où il fallait. Bêtement en tout cas , ne voyant pas de points et persuadé donc que l'on n'est pas sur la cascade maudite, je demande à Adrien de me donner plus de corde pour passer en rappel la cascade. Je pars donc dans la cascade, mais par prudence plutot sur la droite dans une zone plus calme. Et c'est là que je vois, de l'autre coté de la cascade, la main courante et le point de rappel....
Je suis donc au niveau de la cascade et pire, du mauvais coté.... Quand je m'en aperçois impossible de traverser. Je gueule alors pour prévenir mes équipiers, assez paniqué . J'essaye une première fois de me jeter dans l'eau pour traverser la cascade mais impossible les remous m'expulsent vers l'extérieur. Je me retrouve donc bloqué dans une zone heureusement assez calme , avec l'impossibilité de rejoindre la bonne zone de rappel... Les autres comprennent la situation même si la communication est très difficile et essayent de me remonter. Mais à contre courant c'est quasiment mission impossible d'autant que de mon coté je commence à flipper à l'idée que si je lache la corde je me retrouve dans la cascade qui a couté la vie à un espagnol. Je me pose donc dans une zone sèche pour récupérer et reprendre des forces. Entre le stress , le froid et les efforts, je me sens presque à bout. Je me vache donc à la corde grace à deux noeuds autobloquants et attends....
Une fois que j'ai récupéré, un peu, je me remets à gueuler pour qu'il me remontent mais je n'entends rien. 10mn plus tard j'aperçois Lionel 10m plus haut qui me balance une corde avec deux nœuds, pour que je remonte. Je suis contre une paroi raide de 5m environ à la verticale et je dois, après les efforts consentis, remonter sur une corde de canyon, de 10mm, mouillée et lisse , avec le risque permanent de glisser et de tomber dans la marmite.... pas tout à fait ce que j'imaginais, et j'avoue qu'il m'est arrivé de me sentir mieux en montagne et en canyon.
Je renonce donc à cette option et me pose de nouveau. Là Lionel me crie que j'ai une poignée dans mon sac. Je regarde et effectivement j'ai bien la trousse de secours avec une poignée autobloquante et même une pédale. La solution de sortie commence à prendre forme, reste à trouver la force pour se hisser et la technique aussi, car si je me suis déjà servi d'un Jumar c'était aux scouts il y a 17ans......
Après avoir défait les deux nœuds je place donc la poignée sur la corde, accroche la pédale à la poignée, m'assure une deuxième fois avec un autobloquant sous la poignée et attaque la remontée. J'essaye une première fois mais la pédale est trop courte et je m'épuise pour rien. Une seconde encore puis une troisième mais j'ai l'impression d'avoir 100 ans , mon corps semble peser une tonne et mes efforts ne donnent rien.... Je commence à être à bout...
Adrien me conseille donc de mettre mon 8 sous la poignée ce que je fais. Après quelques essais je comprends enfin à quoi ça sert. De cette façon je crée un 2ème point de portage et de tension ce qui va me permettre de remonter plus facilement en avalant la corde grace au 8 puis en remontant la poignée et en me hissant sur la pédale. De plus en basculant vers l'arrière la distance entre ma jambe et ma main est réduite et correspond enfin à la taille de la pédale. Ça y est je suis sauvé je vais ENFIN pouvoir remonter...
A partir de là tout s’enchaîne très vite. En moins de 10mn je suis en haut ravi comme jamais de retrouver Lionel et sa famille..... Je me pose enfin, serein, je suis sorti d'affaire. Eux pas tout à fait . Il leur reste encore à récupérer les cordes en place dans le canyon, ce qu'ils font sans souci, Adrien maitrisant parfaitement les techniques d'assurage. Une fois le matos récupéré il ne nous reste plus qu'à rentrer pour retrouver la voiture vers 12h30 , cette mésaventure ayant durée plus d'1H30.
Pause déjeuner et bières avant de partir faire la via ferrata qui passe au dessus du canyon.... Modeste récompense, même si cette dernière est magnifique, avec des ponts de singe et un parcours d'échelles qui se fini par une partie déversante de toute beauté. La conclusion d'une journée riche en émotion et enseignements.
Beaucoup de choses donc à retenir.
La première est sans aucun doute la solidarité. Mes 3 partenaires ont pris bcp de risques pour remonter sur la rive au niveau de la 1ère main courante et pour venir me chercher. Sans eux j'aurais sans doute passé bcp plus de temps en bas et avec le froid.... Et un MERCI même sincère ne suffirait pas à décrire le sentiment de gratitude que j'ai à leur égard.
La seconde c'est qu'en canyon comme ailleurs il faut toujours bien observer et ne jamais trop se presser. J'ai commis une faute en ne voyant pas les points. Est-ce que ces derniers étaient cachés par l'éperon, est-ce que , m'inspirant trop de la photo où le rappel était à droite, je n'ai pas assez regardé de l'autre coté? Pourtant j'ai pris le temps de me poser et malgré ça je n'ai rien vu....
La dernière c'est que l'eau , comme la neige est d'une puissance inimaginable. En me jetant dans le torrent pour traverser j'ai littéralement été propulsé vers l'extérieur comme un vulgaire bout de bois aux chutes du Niagara. Difficile donc d'imaginer ce qui se serait passé si j'était descendu dans la cascade piège comme dans tout autre torrent, n'ayant pas vu les points....
Le fait est qu'encore une fois ma fin de saison se terminera sur un échec, mais s'il fallait tirer du positif de tout ça c'est qu'au moins ce fut pédagogique. J'ai appris à remonter sur une corde, et je sais qu'il me faudra être plus prudent par la suite en restant humble.
Voilà le canyon c'est fini pour cette année, on verra l'année prochaine en 2015....
Hier donc on est partis avec Lionel , Adrien et Elise sa fille faire le canyon de Sciala. Pierre Jean , le bon de la veille nous avait prévenu.... " il y a une marmite siphonante mortelle où un très bon espagnol est décédé, moi je n'y vais pas"...
Pourtant en se renseignant il se trouve que ce canyon vient d'être rééquipé et qu'une main courante permet d'éviter la dite marmite, source de tant de craintes de ma part. En plus un groupe y est passé 4 jours avant et a trouvé de bonnes conditions. Avec l'entrainement d'hier au Bitet et la préparation de Lionel accompagné d'Adrien qui est lui aussi un pro du canyon, les doutes s'estompent à mesure que le canyon se rapproche.
On arrive donc sur place vers 10h et on s'équipe avant d'attaquer l'approche très courte. En moins de 10mn on est dans le vif du sujet. Et le vif du sujet c'est une eau très froide , un débit qui secoue et un premier rappel qui nous permet d’atterrir au pied du torrent dans le quel il faut se jeter. Très beau passage ensuite avec une eau limpide ,quelques sauts , un rappel avant d'arriver ..... là!
Là, c'est exactement là où il y a les trois rappels. Là c'est à l'endroit où il faut éviter la marmite siphonante. Là , c'est là où il y a eu un mort. Là , c'est là où il faut assurer sous peine de se faire sanctionner, et la sanction, en canyon comme en montagne, peut faire très mal. Première main courante équipée par Adrien et c'est à mon tour de passer. On ne sait pas encore si dessous il y a la marmite mais avant d'attaquer le rappel il me dit clairement de bien regarder partout voir s'il n ' y a pas des points avec la main courante. Je descends de 3m, me pose dans une zone plus calme et observe à droite puis à gauche , mais surtout à droite ( car j'ai été induit en erreur par une photo) et ne voit pas de points. Je ne sais pas à ce moment là si effectivement les points n'étaient pas visibles car cachés derrière un éperon, où si c'est moi qui perturbé par la photo et le stress sans doute, n'ai pas regardé là où il fallait. Bêtement en tout cas , ne voyant pas de points et persuadé donc que l'on n'est pas sur la cascade maudite, je demande à Adrien de me donner plus de corde pour passer en rappel la cascade. Je pars donc dans la cascade, mais par prudence plutot sur la droite dans une zone plus calme. Et c'est là que je vois, de l'autre coté de la cascade, la main courante et le point de rappel....
Je suis donc au niveau de la cascade et pire, du mauvais coté.... Quand je m'en aperçois impossible de traverser. Je gueule alors pour prévenir mes équipiers, assez paniqué . J'essaye une première fois de me jeter dans l'eau pour traverser la cascade mais impossible les remous m'expulsent vers l'extérieur. Je me retrouve donc bloqué dans une zone heureusement assez calme , avec l'impossibilité de rejoindre la bonne zone de rappel... Les autres comprennent la situation même si la communication est très difficile et essayent de me remonter. Mais à contre courant c'est quasiment mission impossible d'autant que de mon coté je commence à flipper à l'idée que si je lache la corde je me retrouve dans la cascade qui a couté la vie à un espagnol. Je me pose donc dans une zone sèche pour récupérer et reprendre des forces. Entre le stress , le froid et les efforts, je me sens presque à bout. Je me vache donc à la corde grace à deux noeuds autobloquants et attends....
Une fois que j'ai récupéré, un peu, je me remets à gueuler pour qu'il me remontent mais je n'entends rien. 10mn plus tard j'aperçois Lionel 10m plus haut qui me balance une corde avec deux nœuds, pour que je remonte. Je suis contre une paroi raide de 5m environ à la verticale et je dois, après les efforts consentis, remonter sur une corde de canyon, de 10mm, mouillée et lisse , avec le risque permanent de glisser et de tomber dans la marmite.... pas tout à fait ce que j'imaginais, et j'avoue qu'il m'est arrivé de me sentir mieux en montagne et en canyon.
Je renonce donc à cette option et me pose de nouveau. Là Lionel me crie que j'ai une poignée dans mon sac. Je regarde et effectivement j'ai bien la trousse de secours avec une poignée autobloquante et même une pédale. La solution de sortie commence à prendre forme, reste à trouver la force pour se hisser et la technique aussi, car si je me suis déjà servi d'un Jumar c'était aux scouts il y a 17ans......
Après avoir défait les deux nœuds je place donc la poignée sur la corde, accroche la pédale à la poignée, m'assure une deuxième fois avec un autobloquant sous la poignée et attaque la remontée. J'essaye une première fois mais la pédale est trop courte et je m'épuise pour rien. Une seconde encore puis une troisième mais j'ai l'impression d'avoir 100 ans , mon corps semble peser une tonne et mes efforts ne donnent rien.... Je commence à être à bout...
Adrien me conseille donc de mettre mon 8 sous la poignée ce que je fais. Après quelques essais je comprends enfin à quoi ça sert. De cette façon je crée un 2ème point de portage et de tension ce qui va me permettre de remonter plus facilement en avalant la corde grace au 8 puis en remontant la poignée et en me hissant sur la pédale. De plus en basculant vers l'arrière la distance entre ma jambe et ma main est réduite et correspond enfin à la taille de la pédale. Ça y est je suis sauvé je vais ENFIN pouvoir remonter...
A partir de là tout s’enchaîne très vite. En moins de 10mn je suis en haut ravi comme jamais de retrouver Lionel et sa famille..... Je me pose enfin, serein, je suis sorti d'affaire. Eux pas tout à fait . Il leur reste encore à récupérer les cordes en place dans le canyon, ce qu'ils font sans souci, Adrien maitrisant parfaitement les techniques d'assurage. Une fois le matos récupéré il ne nous reste plus qu'à rentrer pour retrouver la voiture vers 12h30 , cette mésaventure ayant durée plus d'1H30.
Pause déjeuner et bières avant de partir faire la via ferrata qui passe au dessus du canyon.... Modeste récompense, même si cette dernière est magnifique, avec des ponts de singe et un parcours d'échelles qui se fini par une partie déversante de toute beauté. La conclusion d'une journée riche en émotion et enseignements.
Beaucoup de choses donc à retenir.
La première est sans aucun doute la solidarité. Mes 3 partenaires ont pris bcp de risques pour remonter sur la rive au niveau de la 1ère main courante et pour venir me chercher. Sans eux j'aurais sans doute passé bcp plus de temps en bas et avec le froid.... Et un MERCI même sincère ne suffirait pas à décrire le sentiment de gratitude que j'ai à leur égard.
La seconde c'est qu'en canyon comme ailleurs il faut toujours bien observer et ne jamais trop se presser. J'ai commis une faute en ne voyant pas les points. Est-ce que ces derniers étaient cachés par l'éperon, est-ce que , m'inspirant trop de la photo où le rappel était à droite, je n'ai pas assez regardé de l'autre coté? Pourtant j'ai pris le temps de me poser et malgré ça je n'ai rien vu....
La dernière c'est que l'eau , comme la neige est d'une puissance inimaginable. En me jetant dans le torrent pour traverser j'ai littéralement été propulsé vers l'extérieur comme un vulgaire bout de bois aux chutes du Niagara. Difficile donc d'imaginer ce qui se serait passé si j'était descendu dans la cascade piège comme dans tout autre torrent, n'ayant pas vu les points....
Le fait est qu'encore une fois ma fin de saison se terminera sur un échec, mais s'il fallait tirer du positif de tout ça c'est qu'au moins ce fut pédagogique. J'ai appris à remonter sur une corde, et je sais qu'il me faudra être plus prudent par la suite en restant humble.
Voilà le canyon c'est fini pour cette année, on verra l'année prochaine en 2015....
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